Le cimetière oriental est une des belles choses de l'Orient. Il n'a pas ce caractère profondément agaçant que je trouve chez nous à ce genre d'établissement. Point de mur, point de fossé, point de séparation ni de clôture quelconque. Ça se trouve à propos de rien dans la campagne ou dans une ville, tout à coup et partout, comme la mort elle-même, à côté de la vie et sans qu'on y prenne garde. On traverse un cimetière comme on traverse un bazar. Toutes les tombes sont pareilles. Elles ne diffèrent que par l'ancienneté seulement. À mesure qu'elles vieillissent, elles s'enfoncent et disparaissent, comme fait le souvenir qu'on a des morts (dirait Chateaubriand). Les cyprès plantés en ces lieux sont gigantesques. Ça donne au site un jour vert plein de tranquillité.
Gustave Flaubert, À Louis Bouilhet, Constantinople, 14 novembre 1850
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