Dialogue on the Threshold

Schwellendialog
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16 April 2022

Une maison onirique

La poésie, dans sa grande fonction, nous redonne les situations du songe. La maison natale est plus qu'un corps de logis, elle est un corps de songes. Chacun de ses réduits fut un gîte de rêverie. Et le gîte a souvent particularisé la rêverie. Nous y avons pris des habitudes de rêverie particuliere. La maison, la chambre, le grenier où l'on été seul, donnent les cadres d'une rêverie interminable, d'une rêverie que la poésie pourrait seule, par une œuvre, achever, accomplir. Si l'on donne à toutes ces retraites leur fonction qui fut d'arbitrer des songes, on peut dire [...] qu'il existe pour chacun de nous une maison onirique, une maison du souvenir-songe, perdue dans l'ombre d'un au-delà du passé vrai. 

Gaston Bachelard, La poétique de l'espace, Presses Universitaires de France, 1957

The great function of poetry is to restore to us the situations of the dream. The house of our birth is more than an embodiment of home, it is an embodiment of dreams. Its every corner was a refuge for reverie. And often the refuge placed its distinguishing mark on the reverie. It was here that we acquired the habits of distinctive reverie. The house, the bedroom, the attic where we were alone furnished the frameworks of endless reverie, of a reverie that only poetry, through a poetic work, would otherwise be able to accomplish, to attain. If we grant to all these refuges their function of having arbitrated dreams, we may say that there exists for each of us an oneiric house, a house of dream-memory, lost in the shadow of an otherworld of the real past.

02 November 2021

The elementary life

 La nuit et le silence sont les deux gardiens du sommeil ; pour dormir il faut ne plus parler et ne plus voir. Il faut se livrer à la vie élémentaire, à l'imagination de l'élément qui nous est particulier. Cette vie élémentaire échappe à ce troc d'impressions pittoresques qu'est le langage. Sans doute, le silence et la nuit sont deux absolus qui ne nous sont pas donnés dans leur plénitude, même par le sommeil le plus profond. Du moins, nous devons sentir que la vie onirique est d'autant plus pure qu'elle nous libère davantage de l'oppression des formes, et qu'elle nous rend à la substance et à la vie de notre élément propre.

 Gaston Bachelard, L'Air et les Songes. Essair sur l'imagination du mouvement, Librairie José Corti, 1943

Night and silence are the two guardians of sleep; speech and sight must cease in order for there to be sleep. There must be a surrender to the elementary life, to the imagining of the element peculiar to us. This elementary life breaks free of the trade in pictorial impressions that is language. Without doubt, silence and night are two absolutes that are not given to us in their fullness, not even by the deepest sleep. Leastwise, we must feel that the oneiric life is the purer the more it releases us from the oppression of forms, and that it returns us to the substance and to the life of our own element.